Les viols sont de moins en moins condamnés !

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Ce sont des chiffres dont le Ministère de la Justice n’a pas fait la réclame : les services statistiques de la Chancellerie ont révélé, le 6 septembre dernier, les taux de condamnations pour viols en France. Le bilan est alarmant : si le nombre de plaintes pour viol enregistrées par la police et la gendarmerie a fait un bond de 40 % en 10 ans, concernant 14 130 personnes déclarées victimes de tels actes, le nombre de condamnations, lui, chute d’un taux similaire. En somme, en une décennie, les condamnations de viols se sont effondrés de 40 %, passant de 1652 condamnations par les cours d’assises pour ce crime en 2007 à 1003 en 2016… Les décisions punitives à l’encontre des viols aggravés ont chuté sur le même laps de temps, passant de 1350 condamnations pour viols aggravés à 851 cas.

Du côté de la magistrature, on admet ne pas avoir conscience de la chute des sanctions contre ce crime impardonnable[1]. L’argumentaire du Ministère de la Justice n’est guère plus brave, se raccrochant à l’engorgement des tribunaux. Prétexte fallacieux, puisque la déqualification des faits de viols – bénéficiant du statut de « crime » – en agressions sexuelles – dont le statut est celui du « délit » – visait précisément à poursuivre la procédure en tribunal correctionnel dans le but de désengorger les cours d’assise. Marie-France Lorho avait par ailleurs vivement déploré cette déqualification qu’elle jugeait dangereuse dans sa proposition de loi visant à requalifier les faits d’atteintes sexuelles en agressions sexuelles ou viol.

En effet, une telle requalification de la peine induit une atténuation grave de la peine ; le nombre de condamnations judiciaires (dont celles pour viols correctionnalisés) a chuté de 20 % en dix ans… Dans le cas des viols sur mineurs, un tel laxisme judiciaire ne peut être justifié ; depuis 2005, le nombre d’affaires non poursuivables concernant les plus jeunes ne cesse de s’accroître… De manière générale, le fossé entre le nombre de plaintes et le nombre de condamnations constitue un sujet de préoccupation puisqu’il souligne l’importance du taux de dossiers que le parquet décide de classer sans suite. « 73% des personnes mises en cause dans des affaires de violences sexuelles (viols, harcèlement, agressions sexuelles) bénéficient d’un classement sans suite », était-il récemment souligné dans les colonnes du Monde.

Alors qu’un tiers des auteurs présumés de telles fait ayant franchi la première étape du passage devant le parquet et ayant été mis en examen par un juge d’instruction bénéficient d’un non-lieu total après l’information judiciaire, alors que ne cesse de s’accroître l’abandon des dossiers du fait des preuves jugées insuffisantes prodiguées par des victimes en état de faiblesse (alcool, drogue), le Ministère de la Justice fait profil bas sur son désastreux bilan.

[1] Le Monde, 25.09.2018. P.11.

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