Budget 2019 : le recul de la puissance française ?

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A l’heure des arbitrages pour le budget 2019, une note interne au ministère de l’Europe et des Affaires étrangères destinée au ministre Jean-Yves Le Drian prévient d’un « risque de décrochage » de la diplomatie française. Des coupes budgétaires dans les moyens de fonctionnement ou d’intervention du Quai d’Orsay pourraient avoir des conséquences majeures : ainsi, fin mai, une baisse de 10% des effectifs des fonctionnaires à l’étranger a été annoncée par Gérald Darmanin, ministre des comptes publics. Dans un article récent[1], Le Figaro détaille les effets de telles mesures.

Il s’ensuivrait une perte de leviers d’action en termes de coopération et de développement alors que des solutions politiques aux conflits en cours sont mises en avant dans les discours des autorités politiques. Cela pourrait aussi réduire ou supprimer les bourses scolaires, menaçant le système actuel des lycées français à l’étranger. Il est également possible de voir l’indemnité de résidence à l’étranger des diplomates ce qui d’après la note « produirait un effet désincitatif, voire la création de phénomènes endogènes : tentatives de corruption, perte d’indépendance… ».

Enfin, le plus préoccupant est la remise en question du maintien de la représentation permanente (RP) auprès de l’ONU à New York, réduit à un simple poste de présence diplomatique. Or aux vues de la baisse de nos contributions volontaires à l’ONU la « RP à New York ne pourra plus faire illusion plus longtemps ». L’abandon politique par la France de son siège permanent au conseil de sécurité de l’ONU sera alors objectif, ouvrant la voie à son exploitation par l’Allemagne ou son utilisation comme siège européen. Ce serait là un pas vers le fédéralisme européen, tout cela pour un gain budgétaire limité, le Quai d’Orsay ne pesant que  1% du budget de l’Etat.

Si le président de la République a pu’ par son image et ses discours mener pour certains classements internationaux à une progression de l’influence française, il ne s’agit que d’une illusion due au retrait de l’Allemagne et du Royaume-Uni, alors que la France maintient encore le deuxième réseau diplomatique au monde qui « est de plus en plus une illusion ». En effet tout effort de gestion et de rationalisation ne peut être désormais poursuivi sans porter atteinte aux capacités d’action du ministère.

Un tel recul de notre diplomatie soulignerait le déclin de la puissance française qui, abandonnant une longue tradition d’influence extérieure, deviendrait une puissance secondaire. Quelle ambition pour la France porte donc ce gouvernement ?

[1] Le Quai d’Orsay craint son « décrochage » internationale, Alain Barluet, Le Figaro, vendredi 8 juin 2018, p.6

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